Après avoir dépeint les recoins sordides de Hell's Kitchen au travers de Daredevil et Jessica Jones, tout en préparant toujours un peu plus le terrain pour la future série The Defenders, Marvel, ABC et Netflix se réassocient pour leur troisième série avec Luke Cage, du désormais incontournable et inévitable MCU. Une série qui dénote enfin de par son envie hautement affirmée de baigner dans une ambiance très Soul et hip-hop old-school particulièrement réussie, et dont la bande-son atomique y est pour beaucoup.
Après les ambiances ténébreuses efficaces, mais un poil convenues et impersonnelles de John Paesano (The Labyrinth) pour Daredevil, et les accents jazzy fort bienvenus de Sean Callery (24) pour Jessica Jones, c'est au duo Adrian Younge / Ali Shaheed Muhammad qu'incombe la tâche de mettre en musique le nouvel opus pré-Defenders. Attention, gros uppercut en vue ! Une surprise d'autant plus jouissive qu'une ambition telle que celle-ci dans le panorama du scoring pour série se fait de plus en plus rare. En gros, comprendre une BO de série avec une vraie identité, une véritable aura, une grande générosité (le score fait tout de même 95 minutes), et des références extrêmement bien digérées, jamais envahissantes. On pense indéniablement et automatiquement à Isaac Hayes, aux scores de la blaxploitation, mais aussi à John Barry, à Ennio Morricone, et le tout dans une atmosphère soul et gangsta rap 90's, Wu Tang Clan en tête. Tous les ingrédients y sont : cascade de harpe, violons tonitruants ou reptiliens, basse ronde et fuzzée, vibraphone, orgue hammond, batterie groovy à souhait, cuivres très Barry, trompettes et saxophones très urbains, voix fantomatiques, flûtes sorties tout droit de chez Schifrin, le tout agrémenté de quelques loops éparses. On s'attendrait même presque à entendre quelques scratches de çà et là. Ici l'ambition est claire ; évoquer les racines de harlem (lieu où se déroule la série donc), et recréer une sonorité dont les influences ont clairement infusées, sans cependant jamais tomber dans le « piège » du scoring citationnel à la Tarantino que bien des filous s'empresseraient de comparer au travail de Younge et Muhammad. La démarche est bien différente, la volonté d'accoucher d'une enveloppe sonore purement hybride mixant le meilleur de la musique « Black » des 70's aux 90's, au travers d'un score 100 % original, prédominant sur tout le reste.
Rien d'étonnant dans le brio du score, les deux collaborateurs n'en étant absolument pas à leur gallot d'essai ; Younge avait pu se faire la main avec le très chouette score de Black Dynamite en 2009, en un peu plus psyché, mais au travers duquel on ressentait déjà parfaitement tous les germes et la coolitude de la bande son pour Luke Cage. Quant à Muhammad, co-fondateur du projet A Tribe Called Quest, il fût un collaborateur régulier de Dawn Robinson (ex En Vogue), et Raphael Saadiq que l'on retrouve dans l'excellente partie compilation de l'album, aux côtés de titres de Charles Bradley, Faith Evans ou de la regrettée Sharon Jones apportant leur part de glamour et sensualité en guise de cerise sur le gâteau. Mention spéciale à l'intense Bulletproof Love interprété par Method Man, membre de Wu Tang Clan, d'abord sorti en single afin d'assurer en amont la promo de la série, et dont les textes intègrent une grande part des thèmes que voulait aborder le showrunner Cheo Hodari Coker. Un travail particulièrement inspiré que Mondo magnifie par une édition de toute beauté, pressée sur 2 vinyles jaunes (une des dominantes du costume d'origine de Cage), dont la tracklist est identique à celle proposée par I-tunes (une fois n'est pas coutume), et bénéficiant des excellents artworks de Matthew Woodson. Comme d'habitude avec Mondo, c'est juste la classe ...





