La complexité, la variété, la pertinence et la beauté des thèmes composés pour le premier épisode de la trilogie ont encore de quoi tourner quelques têtes. Tout est là : la tragédie de la chute du Gondor, associée lors du titre à l'Anneau lui-même ; les mélodies paisibles, positives et rustiques de la Comté, nécessaires à la mise en valeur du mal qui nous attend ; la beauté éternelle de Fondcombe et la mélancolie des Elfes de Lothlorien ; la "Tentation de l'anneau", intelligemment soutenue par d'innocents choeurs d'enfants ; l'âge industriel de Saroumane et de son armée Uruk Hai, formidable déchaînement de percussions et de cuivres pensé en 5 noires par mesure, laissant un inévitable goût d'inachevé ; les choeurs funestes et soupirants des chevaliers noirs ; les lamentations des nains dans les méandres de la Moria ; la furie dévastatrice de Sauron et du Mordor ; la construction et la lente désintégration du thème de la communauté, noble et se pliant à chaque saute d'humeur ; enfin, la progressive prise de conscience d'Aragorn, qui éclatera lors d'un combat final épique et déterminé...
Foisonnante, cohérente, d'une profondeur inouïe et d'une maîtrise à se damner, la partition de La Communauté de l'Anneau multiplie les tonalités, les émotions, et propose une expérience profondément immersive, sans même qu'une seule image du film ait besoin d'être projetée. Si le disque ne propose que 75 minutes sur les 170 enregistrées, on appréciera de pouvoir se délecter d'un des plus beaux morceaux jamais composés pour un film, "The Bridge of Khazad Dum", où des choeurs rocailleux soutiennent, tels des basses, de puissantes ascencions cuivrées. A noter enfin que l'ouverture "The Prophecy" est une exclusivité de ce CD, les longs débats de production autour du prologue ayant amené Howard Shore à repenser entièrement son entrée en matière.
