Les deux derniers Star Wars, bien que constellés de morceaux brillants, avaient incontestablement frustré les fans de John Williams, puisant paresseusement dans le score dantesque de La Menace fantôme lors des séquences d'action les plus attendues (la bataille de Geonosis, le crash des Jedi sur Coruscant, le duel entre Yoda et l'empereur). Dans ce contexte, l'originalité forcenée de cet ultime Indiana Jones n'est pas pour nous déplaire.
Peut-être conscient de n'avoir pu pleinement aboutir son travail sur L'Attaque des Clones et La Revanche des Sith (la maniaquerie et les avis changeants de George Lucas durant ses phases de post-productions n'y sont sans doute pas étrangers), Williams a décidé de reprendre son travail à la source sur Le Royaume du Crâne de Cristal. Rien n'étant figé, et encore moins intouchable, le compositeur revisite de manière totalement originale ses thèmes légendaires, d'une Marche des Aventuriers plus mature et plus ludique que jamais (attendez d'entendre la coda du générique de fin pour comprendre) à un Love Theme dédié au personnage de Marion que Williams développe à l'envi lors du grand final. Les citations des leitmotivs originaux ne trahissent par conséquent jamais une autosuffisance de la part de l'auteur, qui prend un plaisir presque juvénile à creuser le potentiel de chaque phrase musicale, traversant toutes les tonalités imaginables et altérant des mélodies passées depuis près de trente ans dans l'inconscient collectif. A cela s'ajoute également une volonté de contredire la réputation cordes / cuivres massive que traîne Williams depuis le milieu des années 1970. Le maestro décuple ainsi le rôle de tous les bois, se livre à des scherzo de flûtes qui ne sont pas sans évoquer Harry Potter et Le Prisonnier d'Azkaban, ou expérimente autour de sonorités méconnues, comme le Continuum Fingerboard, un clavier à ondes employé ici pour la première fois à son plein potentiel.