En pleine sortie d'un désert de plus de tente ans, la Hammer ne doit faire aucun faux-pas.... Ou du moins, le moins possible, La Locataire effaçant presque tous les efforts du joli Laisse-moi entrer.
Studio mythique anglais du cinéma fantastique et horrifique, la Hammer aura connu son heure de gloire dans les années 50 / 60 avec des relectures délicieusement gothiques des classique de la littérature, de la SF lovecraftienne et une bonne poignée de bandes Bis et sexy. Mais après une lente chute au cours des années 70 (écrasées par le modernisme de L'Exorciste), la société avait lentement périclité pour finalement disparaitre. Fin des années 2000, la Hammer renaît de ses cendres et outre un replacement de son catalogue, entame la mise en place de nouvelles productions. Après un Let Me In brillant, relecture du suédois Morse, et en attendant The Woman In Black par James Watkins (Eden Lake !), la refonte du studio anglais tente d'imposer ses ambitions contemporaines avec La Locataire, thriller urbain et sexy confrontant la charmante Hilary Swank et Jeffrey Dean Morgan (inoubliable dans Watchmen) dans une relation trouble et sadique en plein New York. Prenant en compte la modernité de la ville (trop appuyée parfois avec la webcam de sécurité), l'idée de base est de rejouer une nouvelle variation sur la figure du voyeur, homme bien sous tout rapport mais profondément pervers derrière les apparences (merci Psychose).
Jeune réalisateur finlandais s'étant jusque-là uniquement illustré par des clips musicaux locaux, Antti Jokinen s'en tire particulièrement bien tout au long de la première demi-heure. Usant à bon escient du charisme de son duo d'acteurs, il impose un contraste subtil entre le récit romantique, reprenant à son compte tous les codes du genre (la rencontre, les fragilités, la discussion sur le banc), et l'inquiétante étrangeté de certaines images, insinuant une menace constante autour de la jeune femme. D'un côté une photographie et une mise en scène basiques, de l'autre des couleurs plus vives, une caméra plus organique aboutissant à une sordide séquence de bain confrontant le spectateur à ses propres désirs (zieuter le corps de Swank sous toutes les coutures), pervertissant ainsi l'érotisme attendue. Malin, solide à défaut d'être brillant ou particulièrement original, La Locataire s'effondre malheureusement immédiatement après avoir achevé la mise en place des enjeux. Perdu entre la gratuité des apparitions de Christopher Lee (magnétique mais dispensable) et les grimaces menaçantes de Jeffrey Dean Morgan, le long-métrage s'échappe vers l'habituel déballage de manipulations, gros plans et twists prévisibles à souhait comme seuls les téléfilms de seconde partie de soirée savent le faire. La production value est évidente, mais les scènes s'enchaînent désormais mécaniquement, sans souffle, sans tension, sans surprise jusqu'à un dénouement qui jamais ne réussira à donner corps à son décor (un appartement encerclé de couloirs dissimulés et d'yeux de bœuf), ni à retrouver la malice initiale. La Hammer a confondu modernité et passe-partout, et La Locataire ne risque pas de rester dans les mémoires.

