Il y a longtemps, bien longtemps.... Bien avant Le Hobbit et Le Seigneur des anneaux, l'Heroic Fantasy avait pour tout le monde le visage de Willow, autre représentant des petites gens, qui se retrouvait plongé dans une aventure trop grande pour lui. Et, malgré ce que certains peuvent baver, non Peter Jackson n'a pas écrasé le nelwyn sous son talon (ou talent).
George Lucas aura longtemps recherché un succès aussi imposant que celui de la saga des Star Wars. Pour cela, via LucasFilm, il avait déjà produit un Howard The Duck deux an avant d'après un de ses scénario et s'était mémorablement planté (le film est difficilement visible depuis des années, mais nettement mieux que sa réputation). En parallèle, Ron Howard (Backdraft, Da Vinci Code) réussissait tranquillement en ce milieu des années 80 à trouver son public avec les sympathiques Splash et Cocoon. Sans esbroufe, ni génie, il y démontre un talent sincère pour la comédie, le fantastique familial et la gestion des effets spéciaux (déjà concoctés par ILM), faisant sans doute penser à Lucas qu'il tenait là le parfait petit technicien (comme Marquant sur Le Retour du Jedi) qui lui permettrait de réaliser sa version à lui du Seigneur des anneaux sans se casser les pieds avec la gestion de plateaux et ces satanés acteurs. Car il est évident que Willow est bel et bien un film de George Lucas. Un sentiment appuyé par la vision du making of (présent sur toutes les éditions) qui le montre déambuler dans les coulisses, donner des indications à droite à gauche, cadrer certains plans... Faisant d'ailleurs dire à Howard " J'ai parfois le sentiment d'être non pas le réalisateur de ce film, mais vice-président des affaires cinématographiques de Lucasfilm ".
Le film porte irrémédiablement sa patte dans cette réutilisation poussée des thèses narratives de Joseph Campbell (Le Héros aux mille et un visages était déjà à l'origine de La Guerre des étoiles), les gimmicks de montage hérités d'Akira Kurosawa et dans une multitude de détails qui peuvent transformer le film en jeu de pistes pour cinéphiles : la romance Matt Mortigan / Sorsha calquée sur celle de Han Solo / Princesse Leïa, la sorcière Bavmorda et son General Kael tout juste remaniés de La Bataille d'Andor (second long métrage des Ewoks), les références bibliques (Moïse) ou Arthurienne et une structure globale conçue comme un mélange du premier roman de Tolkien et de Un Nouvel espoir (le mercenaire, la princesse...). Le monomythe et les schémas archétypaux comme principaux constituants d'une grande aventure au demeurant parfaitement réussie. Car Lucas avait en ce temps encore un grand savoir faire et fournit un spectacle particulièrement attachant et entrainant, usant de paysages enchanteurs (la Nouvelles Zélande déjà), d'acteurs en pleine forme (Val Kilmer avant pétage de plombs et Warwik Davis à la naïveté désarmante), d'une des plus subtiles bandes originales de James Horner (Avatar) et d'une féerie visuelle qui abusait généreusement des prouesses d'ILM. Le must du must en termes d'effets spéciaux en ce temps là, qui personnifie d'ailleurs le dernier sursaut d'une croisée des chemins où maquillages, stop-motion, animatronics, illusions et matte-paintings cohabitaient magnifiquement avec les premières grandes prouesses de l'infographie (le morphing de Fin Raziel). Le symbole d'une époque, tout comme cet étonnant mélange d'épique premier degré, d'humour galvanisé (certaines répliques sont devenues cultes) et d'une surcouche sombre et inquétante typique des divertissements 80's. Forcément très proche du Hobbit de Peter Jackson (lieux de tournage, reprise picturale de certains gravures issues du même roman), Willow n'en est pas moins une performance unique et mémorable, pleine de charmes et de poésie.



