Bien souvent oubliée dans la grande saga Star Trek, la série animée reste bien évidement une curiosité dans l'univers imaginé par Gene Roddenberry en 1966, mais aussi un jalon ambitieux, une vraie suite de la série classique, aboutissant alors à la première série animée américaine pour adulte.
Cela faillit ne pas être le cas cependant. Aujourd'hui devenu un incontournable de la culture populaire, une référence, Star Trek a connu des premières heures difficiles avec en particulier l'arrêt prématuré de la première série aux bout de trois saisons au lieu de cinq. Une série trop coûteuse, en particulier face à des audiences en dessous des attentes de la NBC. Les épisodes vont cependant être distribués sur les chaines syndiquées (soit l'ancêtre du câble en mode régional) avec des diffusions journalières qui vont peu à peu trouver leur public, créant un véritable engouement autour des aventures de Captain Kirk et sa bande. A tel point que les fans réclament une nouvelle saison, que la NBC envisage de manière plus assurée par le biais d'une série d'animation confiée aux bons soins du plus célèbre studio de l'époque : Filmation. Un habitué des productions à l'économie, mais aussi des licences populaires comme Superman, Archie ou Sabrina la sorcière... Uniquement des programmes pour enfant, et le studio aimerait en faire autant pour Star Trek, imaginant déjà acoquiner chaque personnage avec un équivalent de dix ans ! Quitte à proposer, aidé par la Paramount, des sommes indécentes à Roddenberry pour qu'il abandonne le contrôle de la licence. Ce qu'il n'acceptera bien entendu jamais.
En l'occurrence, l'idée du créateur de Star Trek et d'une bonne poignée de ses anciens scénaristes, c'est de tout simplement poursuivre le voyage de l'Enterprise, en préservant l'univers installé, mais aussi le ton à la fois familial et exigeant des épisodes. Une ambition clairement partagée par les célèbres acteurs, de William Shatner à George Takei sans oublier Leonard Nimoy, qui reviennent tous derrière le micro... excepté le pauvre Walter Koening (alias Chekov) qui héritera de l'écriture d'un épisode en consolation. Exit le pilote d'origine russe, remplacé désormais par le Lieutenant Arex (un alien marron à trois bras), rejoint dans l'exotique par la féline M'Ress. Deux personnages rendus possibles par la liberté dl'imagination de l'animation, et qui introduisent forcément des histoires qui vont se révéler bien plus spectaculaires et démesurées. Si les pitchs de la pluspart des épisodes (désormais d'une durée plus ténue de 22 minutes) sont totalement inédits, quelques-uns sont soit directement des concepts de la série live, abandonnés par faute de moyen (la rencontre avec le diable dans The Magicks of Megas-tu, l'alien se coupant en deux dans Bem), soit des suites directes de célèbres épisodes classiques comme More Tribbles, More Troubles et le retour des boules de fourrure envahissantes ou le célèbre Yesteryear, revenant à la porte temporelle pour envoyer Spock se sauver enfant. De vrais concepts de science-fiction au passage, questionnant toujours autant l'évolution humaine, le sens de la vie, la compréhension de l'autre et la résolution pacifique. Si le ton est souvent plus à l'humour et la décontraction, Star Trek La série animée s'apparente véritablement à la saison manquante, apportant dans la foulée des concepts totalement inédits comme l'Holodeck et ses divertissement virtuels (que l'on retrouvera plus tard dans The Next Generation) ou fait encore avancer l'image des minorités à la télévision, avec l'intervention d'un personnage secondaire amérindien dans How Sherper Than A Serpent's Tooth ( qui gagna un Emmy Award) bien avant le Chakotay de Star Trek Voyager et poussant même jusqu'à confier le commandement à Uhura (une femme !) le temps de The Lorelei Signal et ses sirènes de l'espace qui batifolent avec ce coquin de Kirk à la surface.
Encore une fois donc, une vraie petite merveille d'inventions et de trouvailles, un précurseur indéniable dans le petit monde de la SF télévisée, qui finalement ne souffre qu'une d'une chose : Filmation. Un studio que l'on connait parfaitement en France pour ses aventures des Maitres de l'univers et ses animations aléatoires. Elles sont ici souvent assez rigides, et surtout recyclent à l'envie poses, attitudes et cadrages d'une séquence à l'autre, d'un épisode à l'autre. Pas toujours bien impressionnant donc dans sa fluidité, n'affichant par exemple qu'une seule animation réussie de l'Enterprise (10 secondes) que l'on retrouvera dans toutes les situations (attaque, exploration, plan final...), et pas toujours au service des performances des acteurs dont les intentions sont relayées par deux ou trois expressions différentes. Heureusement, là où les graphistes rattrapent leurs faiblesses, c'est dans les nombreux design proposés, entre les extraterrestres improbables, tentaculaires, aquatiques et conceptuels, et surtout les planètes aux constructions futuristes teintées de l'esthétique disco tout juste affleurante. Star Trek La Série Originale était un pur produit des 60's, La Série Animée s'intègre parfaitement dans les 70's avec même un nouveau générique électrique-pop. Un voyage dans le temps toujours aussi agréable entre un passé pas si lointain et un futur que l'on aimerait toucher du doigt.





