Parabellum : nom masculin du latin para bellum, (prépare la guerre) et : pistolet automatique de gros calibre, qui fut en usage dans l'armée allemande où une crosse adaptable permettait de l'épauler. (Définition Larousse). Avec ce doux nom en guise de sous-titre, ce John Wick troisième du nom donne la température de ce qui nous attend dans cette suite directe du volet précédent.
Petit rappel des faits : après que l'on ait tué son chien et piqué sa bagnole dans le premier film, l'ex tueur John Wick part en croisade pour se venger avec brio. Obligé de reprendre du service dans le second volet, il va se retrouver confronté à la confrérie de « la Table » qui régit le monde des tueurs par des règles que tout le monde se doit de respecter. L'une d'elles sera de ne pas tuer dans les havres de paix que sont les hôtels Continental. Excommunié pour avoir enfreint cette règle d'or, Wick verra sa tête mise à prix et traqué par les plus grands assassins du monde entier. C'est ce que nous conte cet épisode.Il faut bien avouer que ce scénario n'est prétexte qu'à une succession de combats tous plus imaginatifs les uns que les autres. Mais les scénaristes en bon filous qu'ils sont en profitent pour parsemer le film d'éléments narratifs venant épaissir le passé trouble de leur protagoniste principal. En accentuant le côté obscur et ancestral de la guilde des assassins qui régit ce monde fictif, ils plongent l'histoire dans des contrées aux arcanes multiples.
Après en avoir bien exploré les bases dans les précédents volets, la légende John Wick prend son envol pour créer sa propre mythologie. Flirtant avec les frontières du fantastique, le film peut s'offrir toutes les excentricités de son réalisateur. Comme dans une version dark de notre monde régi par une confrérie obscure qui ferait passer les francs-mâçons pour de guillerets bouts en train. Dans ce monde JohnWickien, les cadavres tombent par dizaines aux pieds de citoyens zombifiés sans que ceux-ci ne s'en offusquent, amorphes et inconscients du chaos qui les entoure. Car dans ce New-York parallèle où se concentre la majeure partie de l'histoire il y a autant de tueurs que de new-yorkais et tout cela semble normal. Cette grande pomme de ville n'est d'ailleurs pas une exception ; de Casablanca aux confins du désert, les pérégrinations du pauvre John ne lui laisseront pas une minute de repos. Son monde frôle le mysticisme et le désert initiatique et immaculé dans le lequel il errera cachera le précepteur de toute chose, le grand manitou de « la Table » qui prendra les traits de Saïd Taghmaoui (drôle de choix) en prophète assassin échappé de Lawrence d'Arabie. Malgré ce monde empreint de violence (le film est classé « R »aux USA- les enfants de moins de 17 ans doivent être accompagnés d'un adulte), cet ordre mondial est régi par un code éthique à toute épreuve où, comme en politique, s'écarter des sentiers balisés par la toute puissante « Table » entraîne des conséquences regrettables pour qui veut s'y opposer.
Le réalisateur et ses scénaristes s'en donnent à cœur joie. Ils s'amusent à inventer les situations et les chorégraphies les plus folles tout en conservant un second degré bienvenu en se moquant du fait que tout cela arrive à cause de la mort d'un chien. Les canidés font d'ailleurs ici un retour remarqué sous les ordres de leur maîtresse Halle Berry toujours en grande forme. Actifs dans une séquence anthologique, les toutous à sa maîtresse s'avèrent bien plus meurtriers que les armes de poing. Ce n'est d'ailleurs pas la moindre des scènes de haut vol. Entre une course de samouraïs à motos (merci au The Villaines de Jung Byung-Gil) à un combat aux couteaux d'une rare violence graphique, l'action va non-stop plus de deux heures durant. Pour maintenir ce rythme dantesque, la pyrotechnie et les cascades ont dû se peaufiner sur les six mois de préparation nécessaire au projet. Le résultat est à la hauteur des attentes. Le montage et la mise en scène de Chad Stahelski sont intelligemment étudiés pour faire durer les plans et ainsi apprécier tout le travail fourni. Toujours lisible, l'action en est décuplée par un montage concis bienvenu. En engageant les interprètes/cascadeurs de The Raid, Stahelski rend honneur au métrage qui l'a sans doute fortement inspiré. Aux côtés de Mark Dacascos que nous avons plaisir de retrouver sur le devant de la scène, ils donnent du fil à recoudre au beau Keanu qui 55 ans au compteur garde une forme olympique que beaucoup envierez.
Box-office aidant, cette trilogie ne semble être qu'une amorce vouée à devenir une licence plus que prolifique (une suite, un jeu vidéo et une série sont en préparation). Alors John Wick troisième du nom n'a peut-être pas réinventé le film d'action au niveau mondial mais une chose est sûre, c'est qu'il a redéfini celui d'Hollywood pour un bon nombre d'années.





