Long-métrage ayant révélé le talent immodéré de Kathy Bates, Misery figure sans problème parmi les meilleures adaptations du créateur de Ca. Et pourtant ce n'est pas à un virtuose de la caméra qu'on la doit, mais bien à un explorateur émérite des sentiments humains. Logique, quand on y repense...
Y a-t-il encore un texte de Stephen King qui n'ait pas encore été adapté à l'écran ou qui ne soit pas déjà optionné pour l'être ? Parmi toutes ces productions, parfois juste télévisuelles, peu peuvent toutefois s'enorgueillir de réussir à rester fidèle à l'œuvre du bonhomme tout en restant un essai cinématographique réussi. Parmi ces derniers, il y a bien entendu Misery. Pourtant lorsque Rob Reiner (Princess Bride) s'attaque à l'un des meilleurs romans du maitre du suspens, il ne le fait pas forcément avec un travail de réappropriation aussi marqué que Carpenter sur Christine, Kubrick sur Shining ou De Palma sur Carrie. Ancien téléaste, spécialiste de la comédie tendre (Quand Harry rencontre Sally tout de même), Reiner n'est alors pas le candidat idéal pour s'attaquer à un authentique thriller, psychologiquement exigeant qui plus est. Ce n'est que trop vite oublier que le réalisateur à déjà signé par le passé l'une des meilleures adaptations de l'homme de Castle Rock, avec le touchant et inspirée Stand By Me. Une sensibilité semble donc rapprocher les deux « artistes », et à la vision (et révision) de Misery, il paraît désormais évident que Reiner était l'homme de la situation.
Le roman était un texte sans fioriture ni excès. Une histoire terrifiante de séquestration, de folie furieuse sur fond de fanatisme (avec toujours cet aspect autobiographique de King). Une histoire qui marquait le lecteur par une certaine sécheresse pourtant apte à laisser les personnages vivre tout au long des chapitres. Clairement pas le plus grand esthète du monde, Reiner laisse sa mise en scène en retrait, se contentant de construire quelques plans fixes, d'aligner un montage efficace et de soutenir du mieux qu'il peut les deux acteurs principaux : une terrifiante Kathy Bates (le rôle de sa vie) et un impeccable James Caan. Un duo d'acteurs tout simplement parfait de justesse et d'intentions, soulignant avec brio chacune des facettes des personnages. Flippant, angoissant, Misery le film est un huis-clos étouffant, et pourtant aéré dans sa version cinéma par quelques ajouts inattendu. Histoire de rythmer son intrigue, Reiner revient à ses premières amours en imaginant l'enquête du sheriff local. Un papy débonnaire et souriant mais particulièrement malin dont les joutes verbales et adorable avec sa femme ajoutent clairement à la réussite d'un véritable classique. Un classique autant dans sa forme que dans la perfection de sa construction.



