En 1995, l'Ecosse était à l'honneur sur tous les écrans du monde. Deux grosses productions revenaient sur les légendes héroïques des fameux highlanders au travers du Braveheart de Mel Gibson et de ce Rob Roy souffrant clairement de cette concurrence, et d'une illustration aussi tranchée que basique.
Dans une grande salle aux voûtes écrasantes, quelques contes anglais parient sur l'issue d'un duel. Entre l'évocation de l'homosexualité de l'un, la propension de l'autre à violer les petits garçons, ces personnages maniérés et exécrables jouent de leur verve pour trahir et manipuler l'autre. Des échanges vaguement subtils, cachant difficilement la grande vulgarité de l'occupant. Ailleurs, un grand guerrier écossais fait montre d'un sens de l'honneur exemplaire en traitant quelques voleurs de bétails avec le moins possible de violence. Son haut-fait accompli, il rejoint sa famille parfaite, entre des enfants enjoués et obéissants et une femme fière, romantique mais indépendante. Si chez les anglais le sexe est synonyme d'avilissement (voir la descente aux enfers de la petite servante), chez le fier peuple écossais il est la preuve d'une richesse plus intérieure et d'un amour d'une pureté séculaire. Voilà ce que l'on appelle un manichéisme primaire opposant un gentil iconique et intouchable à des méchants... très méchants.
Pas franchement connu pour sa subtilité, Michael Caton-Jones (Le Chacal, Basic Instinct 2....muhahahaha) assène de manière caricaturale son récit historique, décrédibilisant par la même occasion la moindre prouesse du fameux Rob Roy. Surtout, à force de vouloir dépeindre la perfection de son personnage principal, le cinéaste noie sa mise en scène dans une contemplation pantouflarde et champêtre à la limite d'une fantasy façon l'ouverture de La Communauté de l'anneau. Pas vraiment adapté et bien loin de la fureur du film de Mel Gibson. Sa construction théâtralisée et manifestement à la recherche d'un classicisme évocateur, Rob Roy permet tout de même à un casting de haute volée de livrer un travail admirable : Liam Neeson en sauveur de la veuve et l'orphelin, Jessica Lange en vestale meurtrie, Tim Roth en traitre shakespearien et Brian Cox en veule serviteur offrent au long-métrage ses meilleurs moments, ou en tout cas redonnent au kilt toutes ses couleurs. La fresque manque clairement de discernement et de profondeur, mais grâce à des interprétations solides et une photographie somptueuse signée Karl Walter Lindenlaub (Black Book, Narnia 2), le divertissement reste assuré. A défaut de faire oublier la durée de l'entreprise...


