Si la Hammer reste l'indétrônable impératrice du cinéma d'horreur à l'Anglaise, certaines de ses concurrentes, telle la Amicus, eurent aussi leur heure de gloire et quelques titres honorifiques. Moins connue, car née en queue de comète du genre, la Tigon participa elle aussi, avec une poignée de titres, à l'effort de sang. La ressortie de certains d'entre eux dans la collection British Terrors d'ESC est l'occasion rêvée pour les (re)découvrir.
Créée en 1966 par Tony Tenser (qui produisit les deux premiers films d'un certain Roman Polanski), la Tigon profite donc de l'engouement toujours actuel d'un genre pourtant surexploité depuis des décennies. Ce qui lui permet de s'offrir, à moindre frais, la présence de quelques figures essentielles qui viennent seconder des premiers rôles nettement moins connus. Et c'est exactement ce qui se passe dans cette Maison Ensorcelée, où le héros antiquaire, interprété par Mark Eden (apparu quelques années avant dans plusieurs épisodes de Dr. Who) se retrouve face à trois ténors de l'horreur : Boris Karloff, Christopher Lee et Barbara Steele. Trois bonnes et suffisantes raisons pour se ruer sur le film à l'époque (et encore maintenant!). Reste à savoir ce qui se joue derrière.
Derrière la caméra, le vétéran Vernon Sewell, peu habitué à l'horreur et qui va rendre une copie bien molle. A l ‘écriture, deux scénaristes de Dr. Who, qui vont alimenter le scénario de bric et de broc. D'abord des rêves entre salle de torture moyenâgeuse et fantasmes SM, dominés par la présence toute de verte maquillée et cornue de la madone Barbara Steele. Ensuite par une enquête prétexte menant un peu à tout et n'importe quoi (une conversation rigolote avec un pompiste, une fiesta interminable où l'alcool coule à flot mais qui ne sert absolument à rien). Et enfin à la confrontation avec deux figures légendaires de l'horreur britannique. Soit Boris Karloff, dans la peau d'un vieux patriarche acariâtre en fauteuil roulant secondé par un chauffeur en costume et lunettes noires, et Christopher Lee, comme toujours magnifique même dans ses films les moins bons (s'en est un). Tout ça s'entrecroisant tant bien que mal et avec quelques bâillements.
Mais si le film en lui-même n'est jamais vraiment totalement divertissant, il dresse le portrait intéressant et affectueux d'un genre qui joue désormais avec ses propres codes. Comme lorsque le héros s'étonne du manoir qu'il est en train de visiter et cite littéralement Boris Karloff... qu'il croisera évidemment quelques scènes plus tard. Une blague « meta » en avance de plusieurs décennies qui prouve que le genre avait encore quelques cartes dans sa manche. En plus de ses inaltérables stars.


