Ecorché par un bouche-à-oreille désastreux, le troisième film de Michael J. Basset ne sera manifestement jamais le premier épisode d'une trilogie ambitieuse, devant emporter le justicier exorciste de l'Afrique sauvage au mythe des indiens d'Amérique. Et c'est franchement dommage.
Largement moins connu, Solomon Kane est l'autre grand héros littéraire de Robert E. Howard. Si le premier (Conan le barbare, donc) combat magiciens et sorciers dans sa quête de gloire et de femmes faciles, Kane s'impose comme l'une des rares icônes ouvertement puritaines, visant à détruire le Malin au travers d'un XVIème siècle ravagé par la famine et la maladie. Pas franchement glamour Solomon Kane, mais tout de même puissamment évocateur grâce à son mélange étonnant entre un décorum pseudo-historique et une dark fantasy omniprésente. Largement (et mal) pompé par Stephen Sommers dans son tristement célèbre Van Helsing, le personnage connaît enfin une véritable adaptation au cinéma. Loin du gothisme clinquant post-Matrix foireux de la bouse citée précédemment, le film de Michael J. Bassett (La Tranchée et Wilderness, deux bandes horrifiques très efficaces) retourne aux sources, présentant une Angleterre trempée jusqu'à l'os, pauvre et triste, dans laquelle le fantastique apparaît normalisé certes, mais physique, ancré dans la boue et la pierre.
Habité par la photographie de Dan Laustsen (Le Pacte des loups, Mimic), Solomon Kane se présente comme un film crépusculaire où comme chez John Milius le héros, le vrai, doit traverser les plaines dans la violence et le sang, afin d'embrasser son passé et de découvrir sa place en ce monde. Une vraie fresque épique qui évoque tout autant les tragédies christiques du western spaghetti avec le chemin de croix, la rédemption et la vengeance par les armes. Série B directe et sans fioritures, Solomon Kane est de plus parsemé de créatures sublimes concoctées par Patrick Tatopoulos (Underworld, Je suis une légende), de duels aux doubles sabres, de sorcières et autres goules malfaisantes. Viril et monolithique en diable, James Purefoy (Marc-Antoine dans la série Rome) porte le costume noir comme un personnage de comic book fan de Clint Eastwood avec un air un poil trop emprunté, mais la mise en scène sobre et assez classe de Bassett ramène efficacement le tout au sol. Un maniérisme gothique qui rapproche cette Sword and Sorcery de l'inégal Captain Kronos de Brian Clemens (pour la Hammer) jusque dans une emphase un peu lourde et un scénario qui suit un chemin plus que balisé jusqu'à un climax trop vite expédié sans doute, à cause d'un titan de synthèse pas franchement convaincant. Sous sa dureté implacable, Solomon Kane a de grandes faiblesses, mais on finirait presque par les trouver attachantes.



