Roland Emmerich est un peu un cas d'école. Le plus américain des Européens a toujours eu la prétention d'être calife à la place du calife, de prolonger le sillon creusé par son maitre à penser, Steven Spielberg. Il ne le cache pas. Mais n'est pas le maestro qui veut.
Si l'on peut trouver une qualité dans le metteur en scène allemand (car oui, derrière tout homme se cache des qualités, même si pour certains il nous faut plus de temps pour les trouver), c'est son amour pour le genre fantastique et de science-fiction. Venant d'une famille aisée, il se destine à devenir producteur designer après avoir découvert Star Wars au cinéma. Ni une ni deux, son parcours lui apparaît limpide. Il ne lui en faut pas plus pour s'inscrire dans une école de cinéma où il marque les esprits en faisant de son court métrage de fin d'année Le Principe de l'arche de Noé, un long devenant pour le coup le plus cher travail d'étudiant de toute l'Allemagne. S'ensuit le film Joey qui lorgne allègrement sur les productions Amblin, suivi d'un Chasseur de fantôme pour se faire la main sur la technique. Ses ambitions teutoniques lorgnant vers la conquête du monde, son prochain film bien que tourné sur place se fera en anglais accompagné d'un casting plus international.
Moon 44 va reprendre tous les poncifs des films SF qu'Emmerich affectionne. Il filme pour ne pas dire plagie, nombre d'idées piquées à Star Wars (le plan d'intro sur un long vaisseau traversant l'écran) et surtout à James Cameron. Les soldats caricaturaux à la Aliens, le rat compagnon d'un personnage dans Abyss, allant jusqu'à transformer les duels Marins vs Alien par un affrontement Nerds vs gros bras. Mais Roland Emmerich sait s'entourer d'une bonne équipe technique qui comme lui, en veut. De là à dire que le film leur doit tout, il n'y a qu'un pas. Les maquettes pallient grandement au manque de consistance d'un scénario fourre-tout et pas toujours compréhensible. Malgré tout, Moon 44 porte la patte de son réalisateur ou plutôt ses obsessions pour les destructions (dans la limite de son budget) et sur l'aspect nihiliste de notre monde qui ont fait les succès du Jour d'après et de 2012. Après un pompeux "A Roland Emmerich Film", le film s'ouvre avec un texte explicatif nous stipulant que la Terre de 2038 a déjà épuisé toutes ses ressources naturelles. Prophétique.
Ce dernier film en Allemagne permet à Emmerich, en dehors d'accroitre sa notoriété, de rencontrer celui qui allait devenir son plus fidèle collaborateur, Dean Devlin. Acteur, scénariste, producteur, rares sont les projets du réalisateur qui se feront sans lui. Néanmoins, aidé par son casting de noms plus ou moins connus-Malcolm McDowell et Michael Paré en tête, le film impressionne suffisamment l'international et particulièrement les Etats-Unis pour que les offres affluent. Son pari est réussi. Universal Soldier et Stargate vont lui ouvrir la porte des étoiles des metteurs en scène bankables. La suite on la connait : Indépendance Day va l'assoir sur un trône où sa démesure n'aura que son mauvais goût comme rival. Il n'y a qu'à voir son dernier opus Moonfall pour s'en convaincre.


