Responsable, voire coupable des scripts de Saw IV à VI (il faut bien vivre), sorti de l'anonymat grâce à la série des Feast, Marcus Dunstan passe derrière la caméra avec The Collector, un thriller horrifique surprenant entre Larry Cohen, Brian De Palma et Dario Argento.
Il est étonnant de constater à quel point The Collector, d'un point de vue scénaristique, s'éloigne des précédents opus de Dunstan et de son acolyte Patrick Melton. Aux tenants et aboutissants embrouillés et à la construction sitcomesque des derniers Saw, le film préfère des enjeux humains puissants, posés avec une réelle attention durant un premier acte passionnant. Multipliant des intrigues qui convergeront bien plus tard dans une tornade de violence, Dunstan prend le temps de faire respirer ses protagonistes. Si bien que lorsque la situation se renverse au bout d'une demi-heure de projection, passant du caper-movie sur fond de crise sociale à l'horreur pure, les victimes potentielles ne se présentent plus du tout comme de la chair à canon. Le spectateur vibre pour eux et, chose rare, peut céder à la peur.
La peur, Marcus Dunstan la gère avec un savoir-faire inattendu, grâce à une caméra virtuose caressant les murs de la maison où le Collectionneur du titre va perpétrer ses crimes. Citant maintes fois le cinéma de De Palma (les plongées extravagantes cadrant plusieurs pièces simultanément, et autant de personnages ; les batifolages d'un jeune couple dans la cuisine, inconscients des agissements du tueur), Dunstan se veut également l'héritier des gialli d'antan, jouant à la fois de couleurs hautement contrastées et d'un fétichisme décomplexé (gros plans sur des parties évocatrices du corps féminin, abondance de cuir, inserts sur des yeux, etc.). Si certaines scènes pourraient très bien sombrer dans le torture-porn à la Saw, genre ouvertement revendiqué par les producteurs et le service marketing, The Collector ravive avec talent un genre depuis trop longtemps éteint. Un genre qui, après tout, était la principale source d'inspiration de James Wan et Leigh Whannell pour le premier Saw, avant que les pontes de Lionsgate ne décident de se reconvertir dans une boucherie décérébrée...