Alexandre n'est pas le seul péplum d'Oliver Stone. Quelques années plus tôt sa vision du football américain, sport le plus populaire du pays, conjuguait prouesses sportives spectaculaires et envolées filmiques dans une débauche orgiaque d'icones s'imprimant définitivement sur la rétine.
Cinéaste controversé mais indispensable à la bonne santé du cinéma américain, Oliver Stone n'est jamais aussi à l'aise que lorsqu'il choisit comme terrain de jeu un microcosme ultra codifié de la société américaine. Son regard s'y pose tel une loupe méchamment grossissante et, à l'instar de sa vision des golden boy des années 80 dans Wall Street, use de son décorum pour souligner les failles de la culture ricaine et la perversité de ses systèmes. Avec L'enfer du dimanche (Any Given Sunday en VO), le message se montre cependant bien moins frontal. Drogues, putes, débauche, appâts du fric facile, avilissement par les média, perte d'identité au sein du système, les stars du sport national en prennent certes plein les dents, mais Stone est ici aussi cruelle que caressant. Fan reconnu de ce sport aussi violent que tactique, il s'attache en même temps à dépeindre une fresque sauvage et virile, où les corps se confrontent autant que le verbe, où les différentes philosophies du sport s'affrontent. Une affaire d'Homme, de personnalité où chacun doit réussir à se comprendre, à s'écouter pour ne pas être écrasé sous la brutalité des coups de l'adversaire, mais surtout de la vie.
Cette fresque puissante écrase avec une facilité sidérante des années de films sportifs moribonds et lénifiants. Moderne dans sa mise en image - télescopage de plan, d'effets bien sentis et de sonorités explosives - L'Enfer du dimanche ne décrit finalement qu'une histoire vieille comme le monde. Une opposition générationnelle où seule la beauté du mouvement peut réunir, et qui se construit habilement sur des codes plus anciens, universels, ceux du péplum, genre cité aussi ouvertement (voir les extraits de Ben Hur) que plus subtilement par le biais d'effet de montage phantasmatique rappelant le psychotique Tueurs Nés. Au milieu d'un tel maelstrom d'images, de couches de lectures et de thématiques complexes, on imagine facilement que le casting aurait pu se faire écraser par le rouleau compresseur. C'était sans compter sur les interprétations monstrueuses d'Al Pacino (encore vivant), Dennis Quaid (monsieur « Jamais mort »), Cameron Diaz (carnassière au possible) ou d'un Jamie Foxx bouffant littéralement la caméra. Des gladiateurs des temps modernes qui achèvent de faire de L'Enfer du dimanche un authentique chef-d'œuvre.


