Tout le monde n'a pas eu de Playstation 2. Tout le monde n'a pas forcément eu non plus, à l'époque, la curiosité de sortir des sentiers battus. Cette double ressortie combine donc le mérite de faire patienter avant le futur Last Gardian, mais aussi de souligner l'évidente importance de ces deux aventures dans l'histoire du jeu vidéo.
Profitant de l'engouement de certains pour les restaurations de classiques du jeu video, Sony n'a pas hésité à lancer une nouvelle collection, Classics HD, afin de remettre au goût du jour certains des plus gros succès de la génération précédente, la PS2. Après les indémodables God of War 1&2 ou la trilogie Prince of Persia parue chez Ubisoft, voici le tour d'un cas particulier, le duo Ico et Shadow of the Colossus. Non pas un diptyque scénaristique, mais deux œuvres qui, en plus de partager une équipe créative commune, apporte une même vision du jeu vidéo en tant qu'art. Développées par Japan Studio sous la direction de Fumito Ueda, ces deux expériences produites avec quelques années d'écart démontrent ainsi dès les premières images une force poétique rarement atteinte une manette en main. Décors moyenâgeux traversés par le vent, musiques minimalistes mais mélancoliques, univers fantastique emprunt d'une magie discrète et d'un spectaculaire minutieux... Ces deux versants d'une même pièce laissent des traces. Ico, petit bijou dont la singularité est évoquée par son titre, suit ainsi la fuite désespérée d'un gamin orné de cornes et d'une jolie elfe. Peu de pouvoirs, un bâton pour se défendre ; cette quête dans le labyrinthe d'une citadelle en ruines demande au mieux d'user de la matière grise pour débloquer les portes, et trouver les nouvelles voies entre quelques affrontements sporadiques (et laborieux) avec des ombres menaçantes.
Ueda prendrait la peine de cacher sa principale inspiration qu'il n'y parviendrait pas, tant la ressemblance avec certains mécanismes et le conte de fée enchanteur initié par la saga Zelda est évidente. Comment ne pas se remémorer dans cette nécessité de tenir par la main sa protégée les passages de A Link to the Past où le joueur traversait Hyrule aux côtés de la princesse éponyme. Mais ici le concept n'a rien d'épisodique, il est au contraire au coeur même de l'aventure. Il faut ainsi montrer à la demoiselle le meilleur chemin à prendre, et l'épauler pour lui rendre sa liberté. La proximité avec la licence star de Nintendo est de nouveau l'un des ingrédients évidents de Shadow of the Colossus, reprenant le socle instauré par Ocarina of time (les courses dans la plaine, le rapport à la 3D, la lumière), mais pour l'attirer vers une vision de l'action totalement inédite. Afin de sauver une mystérieuse jeune femme, un guerrier part affronter seize créatures gigantesques. Plus d'escarmouches intempestives, le deuxième opus de Japan Studio se consolide autour de la confrontation avec des boss imposants, qu'il faut souvent escalader, et en tout cas analyser pour découvrir un à un les points faibles et les mécanismes. Complexe, exigeant, extrêmement répétitif, le soft nous revient du coup, à l'instar d'Ico, avec les mêmes menus défauts qui étaient jadis les siens : un gameplay pas forcément des mieux conçus, rendant parfois insupportables certains passages à cause d'une mauvaise gestion physique ou de caméras capricieuses. Les combats ne resteront ainsi pas forcément les meilleurs souvenirs que laissera cette compilation ; les âmes poètes préfèreront s'attacher à des personnages à la fragilité touchante et à des créations visuelles riches et inoubliables.




