Série de tous les records au Japon, dépassant allègrement la centaine de tomes, Jojo's Bizarre Adventure a toujours eu un peu de mal à s'imposer en France. À force de soin et de persévérance, Tonkam rattrape enfin, presque, la publication japonaise, entamant enfin la dernière saga en date : Jojolion.
Un changement de titre qui n'a jamais été innocent dans la longue saga des Jojo, puisque chaque grande série permet à son auteur Hirohiko Araki d'achever un arc narratif et d'avoir le loisir de jouer ou pas sur la continuité. Les amateurs le savent déjà, les autres peut-être non, mais il est tout à fait possible de commencer les Bizarre Adventure par n'importe-quel numéro 1. Ce qui est d'autant plus vrais avec le précédant Steel Ball Run, spectaculaire bifurcation dans la généalogie et désormais ce huitième chapitre qui atteint déjà le 11ème tome au Japon. D'une certaine façon, les Jojo sont clairement l'œuvre de la vie d'Araki, et forcément les années qui défilent se reflètent dans sa manière d'aborder les affrontements fantastiques et délirants de ses héros, toujours plus aventuriers que combattants. La preuve avec ce premiers volume où justement de combat, on n'en verra que la lente amorce, l'instant fatidique en dernière page.
L'auteur a décidé de prendre son temps pour présenter au lecteur les nouveaux personnages, en l'occurrence une adolescente typique japonaise (un peu délurée et fantasque) et le curieux « Jojolion », pour l'instant totalement amnésique et tentant de comprendre ce qu'il fait à Morio, une ville marquée par un (le ?) récent Tsunami. Un protagoniste complètement à la masse d'ailleurs, qui ne comprend pas grand-chose de se qui se déroule autour de lui et usant de ses pouvoirs (pas encore appelé Stand) au petit bonheur la chance. Presque une comédie donc, si ce n'est que le mangaka cultive toujours autant le mélange des genres et s'échappe en milieu de tome vers le thriller en huis-clos, dans un appartement sous le contrôle d'un étrange sadique. Araki cultive les mystères et cela lui va très bien, signant l'un de ses départ les plus originaux, ce qui n'est pas rien, même si parfois sa narration y perd un peu d'efficacité. Là où par contre le doute n'est pas permis c'est sur l'incroyable maitrise visuelle dont il fait preuve. Une maturation déjà considérable sur le précédent Steel Ball Run, et qui se confirme ici avec des designs toujours aussi riches et stylisés, des poses désarticulés et dramatiques, mais une précision du trait, un réalisme des formes ravageurs. Déjà une grande part du succès de Jojo's Bizarre Adventure reposait sur les particularismes graphiques de son créateur (on ne compte plus les expos qui lui sont consacrées dans le monde), mais avec JoJolion c'est époustouflant.

