Volte / Face, Paycheck, Happy Feet et surtout La Mort dans la peau l'avaient déjà prouvé : John Powell est sans le moindre doute le compositeur le plus talentueux de l'écurie de Hans Zimmer. Comme si ça ne nous suffisait pas, La Vengeance dans la peau en rajoute encore aujourd'hui dans la démonstration.
La trilogie Jason Bourne est passionnante, d'un point de vue cinématographique comme d'un point de vue musical. John Powell, responsable des trois scores, avait entamé la saga avec pudeur, poussé vers un traitement électronique par un Doug Liman trop populiste pour porter à maturité son timide film d'espionnage. L'arrivée de Paul Greengrass sur La Mort dans la peau changera la donne du tout au tout, le réalisateur de Bloody Sunday et, plus tard, de Vol 93 ordonnant à Powell une partition frénétique, mêlant sonorités éthniques et numériques à des envolées purement Herrmanniennes.
Ecrit tout en doubles-croches comme pour mieux symboliser la fuite perpétuelle du protagoniste, l'incroyable thème de Jason Bourne reste une pièce maîtresse de La Vengeance dans la peau, le compositeur la gonflant encore de quelques procédés orchestraux pas piqués des vers. Deux suites sortent ainsi du lot, l'une, symphonie arabisante implacable dédiée à l'épuisante scène de Tanger (Tangiers), l'autre, explosion mélodique riche en cuivres apposée à la poursuite en voiture new-yorkaise (Man versus Man). Entraînant, inondant les tympans de percussions et de cordes frénétiques et entêtantes, La Vengeance dans la peau livre de surcroît quelques silences inattendus, reprenant tel un fantôme le thème de Marie (Thinking of Marie ; un hommage à Basil Poledouris ?) ou incarnant, à la force d'arpèges de cordes enveloppants, les remords de son héros (Faces without Names). On attendait beaucoup de John Powell et celui-ci dépasse volontiers nos attentes, livrant ici son oeuvre la plus aboutie depuis Volte / Face.