5 ! Il aura fallu attendre 5 longues années avant que l'extravagant James Gunn ne se décide à remettre le couvert avec un nouveau long-métrage. Horribilis, hymne au bon goût, avait durablement marqué les rétines (et les zygomatiques) de tous les orphelins du cinéma d'horreur comico-gore des années 80 (Evil Dead 2, Brain Dead...) et même s'il n'était pas resté inactif (on lui doit les excellents PG PORN ou encore Human-zee, tous visibles sur la page Youtube de l'ami Gunn), le solide groupe de fans allait enfin arrêter de puiser dans le capital sympathie et se rassurer enfin en voyant le vétéran de la Troma (Tromeo & Juliet) s'engager dans le sillon du banal Monsieur tout le monde qui décide de devenir un super héro.
Alors que ce sujet à la relecture délicate a déjà été traité ces dernières années, dans l'inégal Kick-ass ou dans le DTV Defendor, s'attaquer de nouveau à cette thématique s'avérait être une entreprise hautement casse-gueule et risquait de le faire passer pour un vil opportuniste, prêt à surfer sur la vague du film de Mathew Vaughn. Mais, même si l'amalgame est inévitable pour les non-initiés, nous sommes ici confrontés à un film extrêmement différent de ses concurrents. Une différence cultivée d'une part par une approche nettement moins loufoque, mêlant pessimisme et cynisme et abordant le concept avec un réalisme percutant. Encore une fois, James Gunn prend son public à rebrousse-poil et fait preuve d'audace en faisant de l'ensemble de ses personnages principaux des cas cliniques psychiatriques à part entière. Un coup de poker dont l'impact est impossible à maîtriser, et qui risque fatalement de diviser le public dont l'empathie risque d'être abasourdie.
Véritable bonbon au piment fourré moutarde, Super suit un exceptionnel Rainn Wilson dans la peau d'un paumé intégral, qui décide de « sauver » sa femme junkie des griffes d'un dealer de seconde zone. Et c'est grâce aux bons conseils du Vengeur sacré (dont le masque dissimule les traits du génial Nathan Fillon), et une intervention d'une divinité toute lovecraftienne, que notre protagoniste décide d'aller combattre le mal à l'aide de sa clé à molette, rapidement rejoint par une collaboratrice encore plus cintrée. Outre un casting épatant pour un budget aussi serré (on parle de 2 millions de $ seulement) et une direction d'acteur ébouriffante, James Gunn revisite ce nouveau genre avec beaucoup d'audace et une vision très personnelle, à la fois douloureuse (avec du gros gore qui tâche) et émouvante (difficile de ne pas prendre en pitié le pauvre bougre). Un travail d'équilibriste qui n'est malheureusement pas exempt de défauts, notamment dans sa mise en scène pas toujours inspirée, usant un peu trop des grosses ficelles du film fait à l'arrache (héritage évident de la période Troma), de plusieurs inserts très tape-à-l'œil pas toujours bien gérés et d'un final plutôt ambigu, en forme d'ultime pied-de-nez d'un réalisateur totalement et génialement imprévisible.


