Le grand retour du mythique studio de la Hammer ne se sera pas fait en un jour. Avant le célébré et presque canonique La Dame en noir, le studio en pleine reprise d'activité aura porté un superbe Laisse-moi entrer, un catastrophique La Locataire et ce modeste Wake Wood.
Un petit projet tourné dans la campagne anglaise avec un matériel léger (des cameras digitales solides mais pas forcément dernier cri), mais qui justement s'efforce de ne jamais tomber dans les facilités du genre. Malgré l'image foncièrement numérique, Chris Maris (Frisbiten) travaille une photographie minutieuse en clair obscur et David Keating (qui a vu sa comédie The Last of the High Kings avec Jared Leto ?) signe une mise en scène qui joue justement des contrastes entre cette modernité (présente aussi dans les ruelles du village) et l'aspect intemporel du récit. Une image qui a justement à la fois ses avantages et inconvenants. Ancrant le film dans une réalité extrêmement crue autant pour la contemporanéité du décor que pour la frontalité des effets gore (particulièrement reboutant), elle peu tout autant ajouter une distance avec certaines séquences rappelant trop une matière télévisuelle et fauchée. Mais c'est sans doute ce qui a attiré les dirigeants de la Hammer, voyant en Wake Wood le film idéal pour effectuer un pont entre un cinéma très actuel (de par son filmage déjà) et un héritage non pas gothique, mais bien ésotérique comme pouvaient l'être Les Sorcières, Une Fille pour le Diable ou bien entendu Les Vierges de Satan.
C'est d'ailleurs la première partie du film qui s'avère la plus convaincante, la plus touchante dans son rapport au paganisme, décrivant les pratiques et les rites des habitants du village avec une chorégraphie discrète (mais extrêmement bien pensée), un réalisme constant et donc un naturel qui en affirme une existence parfaitement acceptable. Admirablement interprété par un des acteurs convaincus (un plaisir de découvrir Timothy Spall sans maquillage ni grimaces), Wake Wood est loin d'être l'œuvre terriblement mineure que l'on a rapidement condamnée, marquant durablement par la sensation de mort, d'étouffement et de mélancolie qui s'en dégage. Rappelant à de nombreux instants l'éblouissant Wicker Man, c'est un film fantastique qui mêle avec sobriété le récit d'un deuil impossible (celui d'un couple qui a perdu sa fille mordue à mort par un chien), une réflexion sur la spiritualité en corrélation constante avec la notion de chair et donc de nature. Une vision purement anglaise (celtique ?) des questions de la mort surplombant la vie (thème qui le rapproche irrémédiablement du film de Watkins), mais qui se perd malheureusement un peu dans une dernière partie plus frontale, tournant par instants au slasher fauché. Une oeuvre imparfaite au final mais largement recommandable car constamment honnête, humaine et tristement poétique.


