Dans la chaleur de l'été 1996, alors que les climatiseurs tournent à plein régime, une tornade s'abat sur les écrans du monde entier. Dévastant tout sur son passage tel un dictateur russe en mal de conquête, Twister ne se fera ravir la place d'honneur que par les extraterrestres d'Independance Day. La vague du film catastrophe est de retour pour le plus grand plaisir des spectateurs en manque de sensations fortes.
Fraichement auréolé de son succès surpris survenu deux ans plus tôt avec Speed, Jan de Bont peut se vanter d'avoir un CV à faire pâlir nombre de ses confrères en tant que directeur de la photo. Connu pour avoir travaillé sur la majeure partie des réalisations de son compatriote hollandais Paul Verhoeven, il a offert ses services à des metteurs en scène aussi talentueux que John McTiernan, Ridley Scott ou Richard Donner. Logique, dans ce contexte, de le voir passer à son tour à la réalisation. Son premier film avait beau avoir été un succès, il se heurte aux patrons des studios bien trop frileux pour budgéter correctement son fantasme de longue date : tourner le premier Godzilla sur le sol américain. Steven Spielberg, lui, jamais à court de bons plans sera l'initiateur de son intronisation dans le star-system avec son nouveau projet. Rappelant son comparse qui avait fait croire au monde entier que les dinosaures étaient revenus à la vie dans Jurassic Park, c'est Michael Crichton qui sera avec son épouse en charge du scénario ce blockbuster estival. Twister peut rentrer en production sous le blason de l'emblématique société de production du papa de E.T., Amblin.
Film concept, Twister ne tourne autour que d'une idée : les tornades. Encore faut-il les réussir. Pas question de lancer le film sans que ceux-ci ne soient convaincants. Les magiciens d'I.L.M. jamais à cours de défis potassent leurs lignes de code jusqu'à plus soif afin de donner vie à ces monstres cataclysmiques. Les tests de ces tornades numériques sont tellement concluants que le projet est lancé sans un scénario franchement finalisé et... ça se sent.
On a beau être un auteur de renom, on ne peut pas gagner à tous les coups. Surfant sur les clichés du genre (profusion de personnages, catastrophes exponentielles), Crichton s'embourbe dans son script, sans doute par manque de temps. Faut-il lui en tenir rigueur ? En cette période estivale le spectateur est peu exigeant et les studios fainéants développent le schéma : une idée, un effet spécial, un film. Pour ça, Twister remplit le cahier des charges pour que le spectateur en ait plein les mirettes. Les tornades s'enchainent comme des boss de plus en plus puissants au fil des levels des jeux vidéos. Jan DeBont les filme de manière extrêmement graphique mixant des bruits de fauves dangereux aux tempêtes en furie (comme Spielberg avait pu le faire avec la "mort" du camion dans Duel). Du coup, avec tant d'attention portée à ces monstres numériques, les acteurs ont du mal à exister. Seul le couple formé par Hellen Hunt et Bill Paxton arrivent à tirer leur épingle du jeu. Telles des ombres aux coins de l'écran, on les oublierait presque si ce n'est le débutant Philip Seymour Hoffman insupportable en chien fou que l'on aurait bien vu aspirer par une de ces tornades. Mais non, celle-ci préfère des vaches, camion-citerne et objets en tous genres. Rigolo d'entendre après cela Jan DeBont évoquer la place primordiale des acteurs dans le film et le parallèle entre le cataclysme physique provoqué par les tornades et le drame subit par le divorce de ses deux protagonistes principaux.
Seulement voilà, un quart de siècle après, Twister semble s'être bonifié. Le revival de ces années magiques où la démesure n'avait d'égale que l'insouciance de l'époque semble jouer en sa faveur. Habitué aux clichés on en arrive à regarder le film d'un air moqueur mais conquis ; on sait que le chien va être sauvé, que les héros iront au bout de leur trauma et que les effets spéciaux (même s'ils tiennent encore bien la route) auront vieilli. Mais boudiou, que les popcorns sont bons !




