Parfois considéré à l'étranger comme un Django 2 (ce qu'il n'est pas), Texas Adios fait partie de la première grande foulée de westerns italiens, permettant d'assurer à Franco Nero sa stature nouvelle de star du genre. Un petit western, encore très classique, mais qui en 1966 participa à affirmer la naissance d'un genre.
Si Sergio Leone entama sa propre révolution en 1964 avec Pour une poignée de dollars, la proposition ne fit véritablement goutte d'huile que deux ans plus tard avec une année 1966 particulièrement chargée où le jeune Franco Nero va irrémédiablement s'imposer comme le visage du western italien avec pas moins de trois films mémorables : le cultissime et baroque Django de Sergio Corbucci, le déjà paroxystique Le Temps du massacre de Lucio Fulci et au milieu le plus timide Texas Adios. Là où les deux autres affirment à la fois la personnalité de leurs auteurs et les caractéristiques explosives du western spaghetti, le film de Ferdinando Baldi reste largement plus attaché à une certaine forme épurée, droite et classique encore héritée de l'école américaine. Si Franco Nero, reste bien installé dans sa figure de l'anti-héros taiseux, mal rasés et à la dégaine décalée (ici un manteau serré et fermé où le holster sert de ceinture), il incarne un shériff, un vrai, dont la vengeance contre l'assassin du paternel n'est pas incompatible avec sa volonté de faire juger et écrouer le truand.
Pas d'excès dans Texas Adios, les méchants tombent effectivement sous les balles mais sans effusion de sang, alors que la caméra reste impeccablement posée incarnant les paysages splendides, et encore presque neufs, d'Almeria (Le Bon la brute et le truand se tournait à quelques encablure de là), dans un cinémascope superbe. Si en coulisses ont retrouve quelques noms déjà attachés à Django (le scénariste Franco Rossetti, le directeur photo Enzo Barboni, sans parler de l'acteur principal), le film de Baldi montre un cinéma italien qui se cherche encore, entre héritage et modernité, valeurs sûres et amorces des chamboulements à venir. Si quelques années plus tard le même réalisateur s'engouffrera dans la folie ambiante avec le délirant Blindman (avec Ringo Starr), il se montre ici beaucoup plus mesuré jouant d'ailleurs sur les compositions de l'excellent Antón García Abril (La Chevauchée des morts-vivants) pour souligner le passage d'un Texas encore joyeux et presque idéalisé façon 50's à un Mexique plus sombre et dangereux bien plus 60's. C'est dans cet environnement où apparaissent avec la rébellion populaire en marche les premières bribes des fameux western Zapata inaugurés quelques mois plus tard avec le El Chuncho de Damiano Damiani, et où l'atmosphère se fait légèrement plus pesante alors qu'éclate la vérité sur la teneur plus mélodramatique que shakespearienne qui relie les frères Sullivan avec le riche propriétaire Delgado (José Guardiola) au charisme mafieux.
Pas forcément le plus percutant et le plus marquant des western italiens, Texas Adios reste plutôt intéressant dans sa volonté d'inscrire le changement dans la continuité (oui comme un centriste), distillant quelques codes qui deviendront ensuite communs, plus appuyés, décadents. Plus timorés que d'autres certes, mais tout de même solidement produit, filmé avec emphase, superbement photographié et virilement relevé par la présence imparable de Franco Nero.


