Après avoir surfé sur la vague tarantinienne avec un opportunisme rare (vous avez manqué Arnaques, crimes et botanique et Snatch ? Pas la peine de tenter un rattrapage...), Guy Ritchie décide de redonner un coup de jeune au personnage légendaire de Conan Doyle : Sherlock Holmes. Un rafraîchissement qui a bien des chances de faner bien plus prématurément que les précédentes adaptations de l'œuvre.
L'idée de renouer avec l'un des héros les plus importants de la culture britannique n'était pas mauvaise en soi, d'autant que la série télévisée Docteur House s'était rapidement chargée de mettre en évidence l'intemporalité de ses mécanismes dramatiques. A bien y réfléchir, on aurait même préféré contempler Hugh Laurie en tête d'affiche de ce nouveau Sherlock Holmes, au titre aussi synthétique qu'arrogant, tant la dynamique sur laquelle s'appuie Guy Ritchie semble calquée sur le show de Bryan Singer. Exacerbant de la même manière le caractère asocial du héros, mais aussi son cynisme et son aversion pour l'autorité, le cinéaste et ses scénaristes jugent bon de servir à Robert Downey Jr. un plat propice au plus libre des one-man-show. L'acteur étant plutôt du genre à tirer la couverture à lui et, en cas de directions limitées, à se mettre lui-même en scène, il se dégage vite du protagoniste un certain décalage, la star d'Iron Man prenant souvent le pas sur le matériau supposément référencé. Très juste mais honteusement sacrifié par un script à la fois fouilli et trop focalisé sur son icône (beau paradoxe en soi), Jude Law n'arrive pas à contrebalancer la machine Downey Jr., alors même que le personnage de Watson a toujours été pensé pour équilibrer le rôle de Sherlock Holmes.
Il reste tout de même quelques raisons de se réjouir à la vue de cette nouvelle adaptation. D'une part, Ritchie abandonne les expérimentations prétentieuses qui définissaient jusqu'ici son cinéma, au profit d'un film d'aventure certes décousu mais très correctement façonné. Miracle, quelques idées visuelles font mouche, notamment la manière dont Holmes décompose ses combats en amont, avec la virtuosité stratégique qu'on lui connaît. Autre bon point, la volonté de la production de préserver l'ambiance à la limite du fantastique de la série, avec ce qu'il faut de vraie fausse magie noire, de pseudo-résurrections et de sociétés secrètes. Avec plus de discernement dans sa caractérisation et une énergie un peu plus prégnante (qu'est-ce qu'on s'ennuie, quand même !), ce Sherlock Holmes aurait sans doute pu rivaliser avec Le Secret de la pyramide de Barry Levinson, seule vraie tentative réussie de redonner à la franchise un sérieux coup de jeunesse. Reste désormais à espérer que l'essai soit transformé par l'inévitable séquelle...
« Dur de succéder aux nombreuses réussites qui émaillent la carrière cinématographique du détective de Conan Doyle. Sans prétention et avec beaucoup de décontraction, le long-métrage de Guy Ritchie joue les divertissements de qualité avec un déhanché de dandy. Quelques excellentes idées de mise en scène et un duo d'acteur qui fait mouche : on n'en attendait pas forcément beaucoup plus. »
Nathanaël Bouton-Drouard
FILM : 4/6


