Passé un peu sous le radar, comme tous les Shin Megami Tensei, lors de sa sortie en France sur PS2, Nocturne revient sous la forme d'un tout nouveau HD Remaster entièrement doublé et avec textes français. Une aventure ardue mais marquante indéniablement.
Trop occupés à explorer la série des Final Fantasy qui, seule, faisaient évènement auprès du grand public dans ces premières années de découvertes des grands RPG à la japonaise, les petits français auront mis du temps à offrir l'accueil qu'il se doit aux titres estampillés Shin Megami Tensei. Ils étaient aussi sans doute décontenancés par une approche beaucoup moins permissive et un univers contemporain mêlé de mythologies cosmopolites finalement plus exotiques que la simple Fantasy aussi steampunk soit-elle. Bref, depuis le succès remarquables du spin of Persona, en particulier le dernier Persona 5 sur PS4, un titre comme Shin Megami Tenseu III peut tout à fait retrouver sa place en tant que petit classique du genre. Dix ans après les premiers opus 2D sur Super Nintendo, Nocturne marquait le pas avec son installation sur console Sony et donc une approche graphique 3D dans l'air du temps. Mais si l'épisode impose d'emblée sa différence c'est en transposant son univers ésotérique, peuplé de démons en tous genre, au lendemain d'une apocalypse depuis longtemps annoncé. Non pas un post-apo, mais un juste-après-apo, dans lequel le jeune héros, lui-même devenu mi-démon doit décider du tournant que prendra le monde dans sa reconstruction. Un cheminement qui passe en l'occurrence par de nombreux dialogues, induisants des choix multiples et des prises de positions morales, avec des personnages particulièrement bien écrits, évitant les constructions binaires.
SMT a toujours su se départir d'un regard manichéen et c'est sans doute encore plus évident dans Nocturne, RPG au tour par tour d'autant plus intriguant qu'il cultive une atmosphère particulièrement sombre, pour ne pas dire désespérée, dans des décors urbains souvent décharnés et angoissants. Une note atmosphérique qui n'est pas étrangère non plus à la partition musicale, toujours aussi remarquable, de Shoji Meguro. Incessament carré son approche des combats au tour par tour, SMT approfondit encore ici sa relation avec les nombreux démons et autres créatures mythologiques (inspirées de tous les panthéons mondiaux), ennemis qui peuvent être séduits pour devenir de solides alliés voire le matériel à quelques fusions spectaculaires façon Pokémon (ou est-ce l'inverse ?). Toujours vaste, profond et... méchamment sévère, le titre cultivant une difficulté astreignante entre une poignée de premières heures baladant sans grandes explications (pas de tutorial ici) le joueur face à quelques hordes surpuissantes et des boss qui ne laissent aucun répit. Un petit coté RPG à l'ancienne donc, où chaque avancée, chaque nouvelle découverte se mérite. Pas étonnant que pour cette ressortie, l'éditeur ait décidé de glisser dans le pack un mode dit « Permissif » permettant justement de baisser la difficulté à tout moment.
Un petit pas vers un public plus large mais qui sera bien le seul puisque qu'un HD Remaster n'est pas un remake, et que les nouveautés ou petits bonus à télécharger sont en définitive des DLC payants. Reste un petit rafraîchissement de rigueur avec une qualité, forcément technique, revue à la hausse, mais travail encore et toujours les mêmes modélisations et textures aujourd'hui bien dépassées, les même environnements un peu vides. Seuls les personnages imaginés par l'excellent Kazuma Kaneko, bien plus soignés et légèrement redessinés, gagnent vraiment au change. Un remaster un peu léger donc, mais le jeu proprement dit est toujours aussi incontournable.




